Croissance personnelle en pleine nature par la Gestalt-thérapie

Croissance personnelle en pleine nature par la Gestalt-thérapie

Gestalt-thérapie en pleine nature : les groupes de croissance d’Yves Plu

Yves Plu, directeur de l’école gestalt+ à Rennes, a toujours été passionné par la question du « travailler dehors ».
Cet article vous est proposé suite à un entretien entre Yves Plu et moi.

Longtemps utilisant les chevaux dans du travail thérapeutique itinérant, Yves a décidé ensuite d’ouvrir des groupes de croissance personnelle, en marchant en pleine nature.

Rassemblant un groupe qui s’engage sur plusieurs séances, il propose des séquences de vingt-six heures sur une structure temporelle continue de dix heures du matin le jour un à midi le jour deux, ces séquences étant espacées entre elles de plusieurs mois.
L’essentiel de ce travail est effectué en marchant en forêt, le sac sur le dos, avec l’autonomie dans son sac (couchage, nourriture, etc.).

Selon Yves, le client choisit l’offre de travailler en pleine nature avant le thérapeute lui-même – les personnes qui sont là préfèrent cette approche à une psychothérapie en cabinet, et ont déjà travaillé sur elles de façon conséquente.
Le groupe s’élance dans la nature à partir d’un point de rendez-vous, et pendant vingt-six heures n’importe quel membre du groupe peut travailler à n’importe quelle heure, en marchant ou en « pause de marche ».
Les sacs à dos sont, là aussi, considérés comme lourds, on y trouve à manger, des couchages, des tentes, du matériel, avec une proportion d’inutile. Les sacs limitent la marche, les personnes arrivent avec leurs douleurs et, d’une session à l’autre, le sac s’ajuste. Les thèmes collectifs récurrents sont autour de marcher, porter, ne pas avoir froid, ne pas avoir faim.
Yves construit le parcours en fonction de la symbolique des lieux traversés, dans un environnement qu’il connaît, où la forêt est dominante et où il peut gérer les déplacements avec différentes options. Ils dorment en pleine nature, ce sont plutôt les « marchants » qui décident où ils veulent se poser.
Lorsque nous échangeons sur la question émotionnelle, il se demande si ses clients ne vont pas contacter quelque chose de plus profond que l’émotion : par exemple, sur la question du campement pour la nuit, les clients choisissent en général de dormir plutôt dans des espaces ouverts que dans des milieux protégés et épais. Quand le campement est installé, la parole monte, avec des expressions et des expériences de faim ou de froid, réveillant des sujets très basiques, quelque chose de l’ordre de la survie émerge, qui serait invisible et non travaillable dans un cabinet.
Pour Yves aussi c’est le lien avec la nature qui est central et soignant, c’est-à-dire, « ce que la nature nous fait ». Car en effet, comme nous l’avons vu dans ce livre, à un moment donné, la nature révèle quelque chose, une feuille parle, le vent parle, un oiseau vient se manifester à proximité et là, tout le groupe vibre.
Une chance de développer la conscience de la façon dont nous sommes reliés à la nature, comment un petit oiseau vient nous bousculer, vient chercher quelque chose de très ontologique, quelque chose qui s’ouvre de notre humanité que Yves n’a jamais vu s’ouvrir en salle tout au long de sa carrière.
Ca « se révèle », dans cet environnement-là, à ce moment-là, et il semble que l’ensemble des participants soit d’accord là-dessus. Car c’est cette émotion-là qui est emmenée par chacun de retour chez lui et souvent qu’il ramène à la prochaine session. Quelque chose semble se transporter, d’une session à l’autre, les clients sont comme « déjà partis » en arrivant ».
Est-ce de l’ordre d’une intention ? (« J’ai l’intention de sortir différent de la forêt »).
Car les personnes disent venir chercher quelque chose, dans le domaine existentiel, sur la question de leur être. Sur leurs limites aussi et la peur que leurs limites physiques leur empêchent l’accès à ce développement existentiel.
Yves donne une large place à des moments de silence, ne laisse pas trop se déployer la parole, propose des contes, de la méditation, de la centration, des exercices respiratoires. Il aime aussi faire développer une attention individuelle et mutuelle à comment se porte le sac, par soi-même et par les autres.
Sur la thématique de « qu’est-ce que j’amène à manger, qu’est-ce que je peux faire manger aux autres », les plaisanteries ont tendance à fuser, il les note et les reprend ensuite individuellement avec chacun, considérant que cette question de la nourriture – au sens large – est absolument centrale.

Le bienfait de cette expérience de marche accompagnée est pour lui concentré dans deux points :

  • quand, venant de l’intérieur, se manifeste à la surface que la question de la survie est bel et bien là (toutes les questions liées à l’alimentation, à l’orientation, à conserver de la chaleur). Alors il existe un espace pour traiter en groupe et avec lui, sans l’éviter, le sujet existentiel de sa survie.
  • comment la nature vient chercher la personne, qui se rend compte et vit que sa propre biologie n’est pas isolée de l’environnement. Donc une conscience à la fois de la nature vivante et de la nature biologique de soi. Comme si le mouvement de se visiter depuis son superflu jusqu’à son essentiel pouvait là être en permanence connecté à la nature.

J’interroge Yves, comme je suis interrogé moi-même : quelle est la part du passeur, du guide ? Il me répond que c’est aux participants de s’en saisir, qu’il se propose pour passer d’un point à un autre dans l’accompagnement, c’est-à-dire aussi d’un plan de conscience à un autre, mais tout en se nourrissant lui-même de ce que proposent les participants.

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